Et vogue la galère! Et bien là, c’est fait, je suis à bord du Fortune. Ce gros bateau cargo devrait quitter le port de Montréal dans les prochaines heures pour traverser l’Atlantique. C’est la première étape dans la réalisation de mon projet un peu fou et ambitieux de réaliser quelque chose de grandiose pour l’année 2000. Mon plan est de débarquer à Hambourg en Allemagne.
Durant la dernière semaine, j’ai déménagé tous les meubles de mon appartement pour les entreposer chez mes parents (merci papa et maman). J’ai laissé ma Gipsy chez Denise avec un gros sac de nourriture et les fonds pour la soigner le temps de mon absence. Je dois l’avouer, j’ai versé une petite larme en la quittant.
Ce matin, c’était la dernière matinée que je passe dans mon petit appartement de la rue Somerled. Un dernier tour de piste afin de vérifier si je n’oublie rien dans un placard ou dans une armoire. Il ne reste qu’à remettre les clés des lieux pour commencer à sentir la liberté. Plus de loyers, plus d’hydro, plus de téléphones à payer et si tout va bien, je pourrais profiter d’un hiver en moins dans ma vie. Bon! Je suis prêt à partir et à vivre l’inconnu.
En sortant de l’appartement, le concierge de l’édifice était assis sur l’escalier. Cigarette au bec, je lui ai remis les clés.
– « Voici les clés, monsieur Castonguay. L’appartement est aussi propre que le jour où je l’ai pris il y a 4 ans. »
Il m’a salué en me souhaitant une belle aventure.
J’ai regardé le sol en lui répondant : « Je vais revenir poser mes pieds ici même à mon retour. Ça bouclera mon voyage. À la prochaine ! »
Telle une tortue qui transporte sa maison sur son dos, je suis parti. Mon premier arrêt: le terminal Viau du Port de Montréal. C’est là que j’embarque.
À bord du Fortune
Je viens de remettre mon passeport au 3e Officier qui sera mon «Steward» durant la traversée. Sur le Fortune, l’équipage indien. À peine parti que c’est déjà exotique. Avec mon Steward, j’ai droit à une visite guidée sur le bateau. Au passage, je dépose mon sac dans ma cabine qui se trouve côté tribord. Il m’informe sur les consignes de sécurité et d’évacuation. J’ai accès à tout le bateau sauf là où il y a de gros conteneurs. Ma place préférée sera certainement sur le pont avec le Capitaine.
Ça sent le diésel sur cette grosse chaloupe. Rien à voir avec la Goélette de Cartier ou de Richelieu. Selon mon Steward, nous devrions mettre environ 18 heures pour arriver aux Escoumins. Il me dit aussi que le départ est retardé. Le chargement des conteneurs semble en être la cause.
Compte tenu de la situation, le Capitaine du Fortune m’autorise à quitter le bateau, mais je dois être de retour avant 19 heures. Je saute dans un taxi en direction de chez Renaud-Bray m’acheter un roman à lire durant la traversée. De retour à bord, on m’informe que le bateau larguera ses amarres dans la nuit.
Cette nuit, le fleuve bercera mon âme qui fera des rêves de contrée lointaines. Et vogue la galère!